Procès de l’accident à Cigeo à Bure : faire confiance à ceux qui « ne s’expliquent pas les causes »
C’était le mardi 26 janvier 2016. Un éboulement dans une galerie du Centre industriel de stockage géologique (Cigeo) à Bure causait la mort d’un ouvrier de 42 ans et la blessure d’un second, travaillant tous les deux pour Eiffage.
Cigeo : le site où l’Agence nationale de gestion des déchets radioactifs (Andra), prévoit d’enfouir plus de 83000m3 de déchets, les plus radioactifs des centrales nucléaires françaises, dans plus de 300km de galeries creusées à 500m de profondeur. Dangereux pour la vie et donc l’espèce humaine durant des dizaines voire des centaines de milliers d’années selon leur contenu.
L’Andra répète pourtant depuis le début de ce projet (qui en est donc à deux morts, puisqu’un ouvrier avait été écrasé par la chute d’un tube de 400 kg dans une galerie en mai 2002) que tout ira pour le mieux, que ses galeries tiendront, durant la phase d’exploitation, comprenez de remplissage des alvéoles de plus d’un siècle, mais aussi durant suffisamment de temps pour que quand ça pétera, et donc quand les matières radioactives seront remontées à la surface, elles seront devenues inoffensives.
Et, promis, juré, craché, ça n’aura rien à voir ce qu’il est passé au WIPP de Carlsbad, aux Etats-Unis, un site de stockage qui ressemblait beaucoup à Cigeo (et dont l’Andra en faisait la pub avant le drame) et qui devait tenir au moins 10000 ans.
Mais pas de bol, le 14 février 2014 un grave accident a eu lieu, avec des fuites radioactives importantes sur tout le territoire, des milliards de dollars de dégâts (mais ça on s’en fout), et deux ans d’arrêt forcé.
Mais ici, en France, où on est sérieux, pas de ça. Les galeries de Cigeo, c’est du solide. Enfin presque. Quand l’éboulement a eu lieu en 2016, on est beaucoup à avoir pensé que ça allait sérieusement compliquer la suite du projet.
Sauf que… l’affaire a été enterrée, la communication a repris de plus belle, et les consciences se sont endormies. Jusqu’à ce mois de février 2024 et le procès qui vient de se tenir au tribunal de Bar-Le-Duc.
Dans le box des accusés, pas de militant cette fois, mais Eiffage, et le maître d’œuvre, Antea France. Parce que David Viarre est mort. Et la défense n’a fait que répéter qu’elle ne s’explique pas les causes de l’accident.
Le procureur ne demandera pas l’arrêt de Cigeo. Non. Il demandera 30000 euros d’amende (délibéré le 4 avril), soit le prix de la vie d’un ouvrier sur un projet titanesque, le plus fou de ce XXIe siècle, le plus dingue de France.
Dont les galeries vont tenir durant des siècles, des millénaires, des dizaines de milliers d’années. Oui, promis, juré, craché, sur le Coran, la Bible et la Torah. Ce sont les devins, pardon les scientifiques de l’Andra qui l’affirment.
*Photo prise dans les rues de Metz où l'on voit la communication de l'Andra en 2023
RobV pour le Pavé Lorrain
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