Puisqu’il est admis qu’un journaliste, pardon un banquier, pardon un chargé de communication des journaux du groupe Ebra, possession du Crédit mutuel, L’est répu, Le Républicain Lorrain et Vosges Matin en tête, sont presque tous incapables d’autocritique quant à leurs (mé)faits et gestes dans leur boulot, très éloigné du journalisme donc, il faudra un jour faire leur procès dans l’affaire de l’explosion des votes pour l’extrême droite.
Comme le démontre régulièrement Acri- med (Action critique médias, voir les innombrables analyses sur leur site internet), chiffres à l’ap- pui, les médias nationaux ont une grosse responsabilité dans la montée du Rassemblement na- tional et autres Reconquête, ce que la création du « monstre » Zemmour a également montré.
Et on ne parle pas ici seulement des médias militants de l’extrême droite, comme C News ou BFM, et de leurs petits soldats aussi minables que dangereux que sont les Cyril Hanouna et autres Pascal Praud. Non.
On parle aussi de France télévision, de Radio France, de TF1, etc. qui n’ont eu de cesse d’inviter dans leurs émissions Marine Le Pen et ses enfants, ou de banaliser leurs idées.
Dans ce procès des pseudo journalistes, on ne s’arrêtera pas aux médias nationaux. La bande à Christophe Mahieu, le directeur de publication des trois titres régionaux susnommés, sera aussi dans le box des accusés.
Déjà, parce que oui, une politique du (presque) tout fait divers a des conséquences. Quand on ordonne à ses troupes de raconter le moindre feu de poubelle du coin de la rue, « parce que ça fait du clic, vous comprenez, et le clic attire les annonceurs publicitaires et leur fric, seuls à même de nous sauver de notre dégringolade », ça déclenche des choses chez les lecteurs qui lisent encore les articles (oui, beaucoup s’en sont allés, épuisés de voir le niveau de ces médias s’effondrer à une telle vitesse).
Cela joue en effet sur « le sentiment d’insécurité ». Le sentiment. Pas l’insécurité, non. Sur ce sujet, les spécialistes, les vrais, pas les rigolos de pla- teau télé, expliquent bien, chiffres et sources à l’appui, que la société française est bien moins violente qu’il y a 75 ans, voire 50 ans.
Et que dans l’ensemble, et l’Insee le montre aussi chaque année, les faits de « délinquance » (si on veut parler comme le pouvoir, parce qu’il y a évidem- ment sur ce qu’est la délinquance, mais ce n’est pas le sujet) restent globalement stables, baissent un peu ici, augmentent un peu là. Tout ceci étant aussi modifié par les pratiques des flics, à qui on demande de prendre plus de plaintes pour ceci ou cela, en fonction du vent, des politiques et des préfets.
Mais quand l’habitant des campagnes (où le vote RN est très élevé), voit à longueur de pages des accidents, des tentatives de viols, voire même des articles sur des violences inexistantes (régalez- vous de textes comme celui-ci : https://www.republicain-lorrain.fr/faits-divers-justice/2020/11/07/ une-altercation-sans-temoin-ni-victime), il a peur. Et son sentiment d’insécurité augmente. Lo- gique.
Une simple discussion avec les « gens », dans la rue, suffit à le comprendre. « Quand on voit ce qui se passe »... « Quand on lit toutes ces horreurs »... « On dirait que ça merde partout, que la violence est partout »... Ce sont des propos courants, des réponses récurrentes.
Plutôt que d’amener à réfléchir, les rédacteurs, enfermés dans leur quotidien à 2000 à l’heure ou tout simplement formatés par leur direction, deviennent aussi les grands militants de la répres- sion, du déploiement des caméras de surveillance, de l’augmentation des effectifs policiers...
Ils ne les remettent jamais ou très rarement en cause. Ils n’exercent également pas leur métier quand ils évacuent les critiques dont sont légitimement l’objet les forces de l’ordre, parce que ce sont leurs informateurs de faits divers.
Dans cette logique du « tout fait divers », ils ne peuvent se cou- per de leurs sources policières et préfectorales. Ils épousent donc leurs propos, sans discernement, sans nuance. Toujours du côté du manche, presque jamais du côté des victimes du (des abus de) pouvoir. Tout cela, bien sûr, fait le jeu du RN.
Et puis les trois titres du sieur Christophe Mahieu participent aussi à la banalisation de ce parti en l’invitant un peu partout dans ses pages, alors que, rappelons-le, le fondateur du Républicain Lorrain avait eu le courage de saborder son journal lors de l’occupation nazie (à L’est répu, on avait cessé la parution), où grenouillaient les fondateurs du parti de Marine Le Pen.
Et puis ils euphé- misent tout un tas de faits, comme des affaires aussi graves que la soirée néo-nazie de Combres- sous-Les-Côtes, en Meuse, le 15 juin, avec 300 délinquants européens, pour certains ex meur- triers, qui peuvent paisiblement s’adonner à leur sport favori : la violence.
Sans parler du traitement de ces faits divers, qui heurtent bon nombre de personnes (les « origines » citées, etc), de la participation à la création d’Eric Zemmour, ou du fait que la course à l’immédiateté, aux articles courts, aux titres accrocheurs, concourt à la baisse du niveau de réflexion des lecteurs.
SCM pour le Pavé Lorrain
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