Les premiers antifascistes sont les Arditi del Popolo sont une organisation antifasciste italienne fondée en 1921 en réponse à la montée en puissance du fascisme en Italie. Formés principalement d'anciens combattants de la Première Guerre mondiale, de militants socialistes, anarchistes, communistes et de syndicalistes, les Arditi del Popolo ont joué un rôle crucial dans la résistance aux violences fascistes menées par les « squadristi » de Benito Mussolini. Leur nom, qui signifie « Braves du Peuple », fait référence aux Arditi, des unités d'élite de l'armée italienne connues pour leur bravoure durant la guerre.
L'organisation est née dans un contexte de forte instabilité politique et sociale en Italie, marqué par des luttes ouvrières, des grèves générales et une répression croissante de la part du gouvernement et des fascistes. En 1919 et 1920, connus comme le « Biennio Rosso » (les deux années rouges), l'Italie a connu un pic de mouvements ouvriers et paysans revendiquant de meilleures conditions de vie et de travail.
Face à ces luttes, les fascistes ont intensifié les attaques violentes contre les organisations de gauche, les syndicats et les communautés ouvrières, soutenus implicitement par les autorités.
Les Arditi del Popolo se sont distingués des autres groupes politiques par leur approche unie et non sectaire de la lutte contre le fascisme. Contrairement aux partis traditionnels, ils ont cherché à rassembler tous les antifascistes, indépendamment de leur affiliation politique, autour d'un objectif commun : résister aux violences fascistes par l'autodéfense. Leur structure était décentralisée, avec des groupes locaux opérant de manière autonome, mais coordonnés par un commandement central.
L'un des épisodes les plus marquants de l'histoire des Arditi del Popolo a été la défense de la ville de Parme en août 1922.
Sous la direction de Guido Picelli, un des chefs emblématiques du mouvement, les antifascistes ont repoussé une attaque massive des squadristi de Balbo, l'un des principaux lieutenants de Mussolini. Pendant cinq jours, les Arditi del Popolo ont tenu tête aux fascistes grâce à des barricades, des actions de guérilla urbaine et un soutien populaire massif, infligeant une défaite humiliante à leurs assaillants.
Le mouvement des Arditi del Popolo a cependant été confronté à une répression intense, non seulement de la part des fascistes, mais aussi des autorités étatiques qui voyaient en eux une menace à l'ordre établi. Les socialistes réformistes et les communistes du Parti communiste italien (PCI) ont également hésité à soutenir pleinement les Arditi del Popolo, préférant suivre une stratégie plus légaliste ou centrée sur l'action parlementaire. Cette division au sein du mouvement ouvrier a affaibli la résistance antifasciste et a facilité la prise de pouvoir de Mussolini en 1922.
Malgré ces défis, les Arditi del Popolo ont continué à mener des actions de résistance tout au long des années 1920, organisant des attentats, des sabotages et des actions directes contre les infrastructures fascistes. Leur influence a été particulièrement forte dans les centres urbains et industriels du nord de l'Italie, ainsi que dans certaines régions rurales où les luttes paysannes étaient intenses. Bien que souvent réprimés et marginalisés, ils ont laissé un héritage important pour la résistance antifasciste italienne.
Le déclin des Arditi del Popolo a coïncidé avec la consolidation du régime fasciste. Mussolini, après avoir pris le pouvoir, a intensifié la répression contre toute opposition, y compris les antifascistes les plus déterminés. Beaucoup de membres des Arditi del Popolo ont été arrêtés, emprisonnés, exilés ou assassinés. Le mouvement a progressivement été dissous, bien que ses idées et ses méthodes aient continué à inspirer d'autres formes de résistance antifasciste, notamment durant la Seconde Guerre mondiale avec la lutte partisane.
L'héritage des Arditi del Popolo est aujourd'hui reconnu comme une partie essentielle de l'histoire de l'antifascisme en Italie. Ils sont considérés comme les premiers à avoir compris la nécessité d'une lutte directe contre le fascisme, anticipant par leur action les futures batailles menées par les résistants pendant la guerre. Leur engagement a montré que le fascisme ne pouvait être combattu uniquement par des moyens parlementaires ou pacifiques, mais nécessitait une réponse active et militante.
Les Arditi del Popolo ont également mis en lumière le potentiel de l'unité antifasciste au-delà des divisions politiques. En rassemblant des individus de divers horizons idéologiques, ils ont montré qu'une résistance commune était possible face à une menace qui dépassait les clivages partisans. Cette leçon d'unité a marqué les mouvements antifascistes ultérieurs et reste pertinente dans la lutte contre les idéologies autoritaires.
Aujourd'hui, les Arditi del Popolo sont parfois célébrés par des groupes antifascistes contemporains en Italie et ailleurs, qui voient en eux des précurseurs de la résistance populaire. Leur histoire est rappelée comme un exemple de courage face à l'oppression et de refus de se soumettre aux dictatures. Des commémorations, des livres et des recherches historiques contribuent à faire revivre leur mémoire et à rappeler l'importance de leur combat.
La réhabilitation de la mémoire des Arditi del Popolo est aussi une manière de rappeler que l'antifascisme ne se réduit pas à une idéologie, mais est avant tout une pratique de lutte et de solidarité contre l'injustice. En tant que pionniers de cette lutte, ils restent un symbole de l'engagement de toute une génération contre le fascisme et pour la liberté.
Comments